Je ne m’attendais pas à ce qu’Eric m’appelle. Cette histoire a pris des proportions auxquels je ne m’attendais pas. Je n’avais pas entendu sa voix depuis des siècle me sembla-t-il. Et je n’eu pas besoin d’attendre pour connaître le motif de brusque rappel à ma bonne mémoire. Difficile de ne pas me laisser attendrir par ses arguments de gentil grand frère. Il voulait aider Louise bien entendu. Comme tout le monde il était inquiet. « Car tout le monde est inquiet ! » s’exclama-t-il comme s’il souhaitait me tirer par les pieds pour m’ouvrir les yeux. Impossible de lui répondre que de cette famille j’étais la seule à ne pas m’inquiéter pour l’enfant prodigue. La seule à m’en moquer. « Mais que t’a-t-elle fait bon sang ? – Pourquoi ne lui demandes-tu pas toi-même ? – Tu sais comment elle est… – Ah ça oui justement -  Elle s’obstine à ne pas répondre, elle m’a même raccroché au nez ! – Je suis bien gourde de ne pas en faire autant… ».

Je regarde mon salon… Mon coin cuisine. Ils rêvent tous autant qu’ils sont !

_ J’ai fait des études, j’ai bossé pour gagner de quoi m’acheter ma maison et ne dépendre de personne… Tu le comprends ça ? J’ai travaillé pour qu’on me fiche la paix, pour ne pas avoir de mec dans les pattes… Je n’ai pas fait d’enfant lorsque j’en avais l’occasion… Pour être tranquille tu comprends ? Tranquille…

_ Tu mélanges tout…

_ Je ne mélange rien… Les parents de Louise ceux sont vos parents… Pas moi. Je n’ai pas d’enfant, ce n’est pas pour me taper celui des autres…

Je réfléchis deux secondes à ce que je viens de dire, à l’énormité de mon propos. Mon boulot n’est-il pas d’essayer d’apprendre des choses aux gosses des autres ?

_ Je te le demande comme un service… Fait le pour moi… Juste un mois pour la sortir de là…

_ Elle n’est pas si mal barrée que tu le crois… Elle a choisis tout cela, et elle en est très fière crois moi… D’ailleurs elle en pense quoi elle de votre vieux plan ?

_ Elle n’aura pas le choix… Elle saura voir où est son intérêt !

Je me demandais en l’écoutant dans quel œil, le droit ou le gauche, il venait de fourrer son doigt…

_ A part ça la vie ? fis-je.

Mais il n’était pas du genre à lâcher aussi facilement et je le savais.

_ Tu te souviens de ta promesse ? me fit-il.

_ Quelle promesse ?

Mais je le savais très bien rien qu’au ton de sa voix, suave et lointaine… Je ne l’avais pas entendue depuis longtemps. Un frisson parcouru mon dos tandis que de vieux et agréable souvenirs traversaient mon visage, mon coeur et mon regard.

_ Tu sais très bien Stef… Tu sais très bien… répondit-il en me crucifiant.