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L'envie

Erwann avait un sacré niveau. Il était très bien classé, et j'aimais aller le voir jouer, le voir gagner. Mais ce que j'aimais tout particulièrement, c'était jouer avec lui en double. Je crois que c'est à l'issu d'un de ces matchs de tennis qui nous voyaient toujours nous affronter Erwann et moi d'un côté du filet, contre mon frère et Claire de l'autre, que cette dernière trompa son Pierrot, et que ma meilleure amie devint la chérie attitrée de mon frère adoré par un printemps riche en soleil. J'en fus la première surprise. Presque tous les soirs nous allions jouer. J'adorais, et j'adore toujours colorier mes chaussures en rouge sur la terre battue. Faire des glissades. Marquer des points. Taper les balles comme une forcenée. J'avais alors un bon niveau même si je ne jouais pas de tournois et n'était par conséquent pas classée. Avec mon 1m77 j'avais un avantage incontestable pour le service et gagner au filet. Gauchère je gênais mes adversaires. Erwann ne tarissait pas d'éloge concernant mon jeu de jambe. Il s'avouait par contre plus gêné lorsque nous jouions ensemble, notamment lorsque j'étais à la volée. "Je l'ai râtée c'est de ta faute! Tu as remué les fesses et du coup j'ai oublié de regarder la balle!" ou encore "On a perdu par ta faute... Je t'ai dit de ne pas mettre de jupe, et toi tu mets un short encore pire!". Un mauvais perdant donc. Et un flatteur. Mais c'est ce que j'appréciais. Avec lui je n'étais pas seulement belle, jolie ou magnifique, mais entourée. Je n'avais pas ce sentiments que j'ai eu avec d'autres que le plus important était mon physique. Il me donnait beaucoup, je recevais en grande quantité. Et ma seule peure était de ne pas être à la hauteur. Ne pas lui rendre tout ce qu'il m'apportait.

Erwann était un fonceur. Réfléchi mais fonceur. Toujours à 100% dans ce qu'il faisait, et ça j'aimais bien. Il me faisait prendre de la vitesse. Il me remuait lorsque je commençais à m'endormir. Grâce à lui j'ai appris à aller vers les choses, à prendre confiance en moi. A rentrer dans la vie sans trop de peur. Utiliser hors des cours de tennis ce que j'avais en moi d'envie de frapper et bien faire les choses. Et si je m'écorchais je ne me faisais jamais mal. Cela passait très vite. Et s'il fallait, en cas de bobo, il n'était jamais très loin. Par ailleurs je ne fus jamais autant entourée. Il y avait mon frère dont j'étais chaque jour plus proche, mes soeurs pour qui j'étais devenue plus que la petite dernière qu'on couve. Mes rapports s'étaient aussi approfondis avec mes amies. Si parfois je connaissais la solitude c'était par choix, par envie et besoin. Jamais par contrainte. J'étais à présent loin de l'enfance et j'aimais davantage la vie. Je vivais. Je n'étais plus résignée. Je devenais plus extravertie.

J'avais du goût pour tout. Erwann aimait que nous allions à Paris. Originaire de province, il avait cette fascination qu'ont bien des personnes qui ont grandi dans de petites villes loin de ce qui fait les charmes de la capitale. Avec lui j'allais voir des films qui ne passaient qu'à Paris, au théâtre, à des concerts. On ne comprenait pas grand chose à la peinture, mais on y allait quand même. Tout à un goût bien meilleur lorsque l'on n'est pas seule. Qu'on ne se sent plus seule. Lorsqu'on est avec une personne qu'on apprécie. Non, je ne connaissais pas l'ennui. Même en cours, j'étais heureuse d'apprendre des choses. Chercher des choses sans importance dans le seul but de savoir. Ouvrir de temps à autre un journal pour être un peu moins bête. Je pouvais à présent parler et ne plus seulement me contenter d'écouter les autres avec l'admiration de ceux qui ne comprennent pas. Je dévorais tout et je crois qu'Erwann se régouissait de me voir ainsi, peut-être même s'imaginait-il être pour moi une sorte de Pygmalion. Et d'une certaine façon il n'avait pas tort de le penser. Le matin je me levais avec la soif de celle qui sait que la journée réservera des moments de plaisir. Et même lorsque j'allais un peu mal, sans vraiment savoir pourquoi le plus souvent, ou parce que quelque chose m'avait vexé, une reflexion de la part de quelqu'un ou une note au lycée, je savais affronter cela sans sombrer, de façon pratique. Même la douleur avait quelque chose qui m'apprenait. Elle commençait à m'appartenir et elle ne me faisait plus perdre pied comme par le passé. Il y avait dedans quelque chose qui je le sentais me faisait avancer et grandir encore. Non ce n'était pas rose tout le temps, mais je trouvais que tout cela avait un sens. Je savais ce que je faisais là. Les gens que j'aimais me le rendaient bien. Seule je serais peut-être devenue la même personne, mais je ne peux pas en jurer.

 

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Ecrit par stefie, le Jeudi 3 Juin 2004, 12:11 dans la rubrique Premiers Pas.