Je crois que j’avais envi que ce soit moi qui l’emmène, que ce soit moi qui lui offre ce week-end. Il y avait eu du soleil toute la semaine, jusqu’au vendredi soir. Les nuages sont arrivés en fin de soirée, à l’heure où tombe la nuit, alors que nous nous engagions sur cette autoroute vallonnée qu’est celle de Normandie. Au milieu du trajet je lui avais laissé le volant. Je n’avais plus envi de conduire, j’avais sans doute compris que la pluie ne nous quitterai pas de tout le week-end, j’avais envi de faire demi-tour.
K-Way au dehors, et vêtements suspendus partout où cela semble possible dans notre jolie chambre d’hôtel. Une chambre agréable d’ailleurs, soigneusement décorée. De la fenêtre on peut essayer de voir la mer sous la grisaille, on peut contempler la plage sur laquelle passe de temps à autre des promeneurs en vêtement de pluie. « Tu ne trouves pas cela amusant, en ville on en voit jamais, et dès qu’on arrive en bord de mer, le ciré jaune fait son apparition… ». J’ignore si je trouve cela très amusant, mais j’apprécie qu’il essaie de me faire retrouver le sourire. Il m’ouvre ses bras, j’essaie d’arrêter de faire la gamine privée de dessert. « On sort ? » demande-t-il.
_ Pour quoi faire ?
Il sourit, me passe mon K-Way. Etrange ce garçon. Il prend des mines sombres dans les endroits où tout le monde sourit et se force à avoir l’air heureux. Lui il n’y prend pas sur lui, il ne se force pas. Puis là, alors que tout pousse à désespérer, je ne l’ai jamais vu aussi souriant, aussi détendu.
Nous n’avons fait que quelques pas et nos visages ruissèlent déjà. Il s’amuse à boire sur mes joues, et si je suis d’abord encore sous le coup de mon chagrin de ce week-end pluvieux, il semble bientôt que ses coups de langue brise la statue d’argile dans laquelle j’étais enfermée. Il me fait sourire puis rire. Je lui lape les joue à mon tour à grand coups de langue. Les joues faites je m’attaque à son front. Il se barre en courant lorsque j’en fais trop. Je cours à perdre haleine. Mais je ne suis pas prête pour les J.O. Cinquantaine mètres de sable plus loin, j’en ai plein les baskets, je suis essoufflée sous ma capuche. Il revient sur ses pas. Je le feinte pour le mettre par terre. Il se laisse tombée. On chahute sous la pluie, on tente de faire manger du sable à l’autre. Quand j’y repense, j’ai l’impression de revoir les vieilles pellicules que mon père avait tournée sans le son, avec des mouches sur l’écran, et l’image qui saute. Je suis trempée et j’ai du sable plein partout. Il me semble toucher du bout des doigts le bonheur lointain, que ma vie sort du noir. Sur cette plage. Sous la pluie.
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Commentaires :
Re: chahuter sous la pluie en k-way sur la plage
Contente de voir que tu es de retour :) Bonne continuation a nouveau ;)
Biz'
chahuter sous la pluie en k-way sur la plage
Frédéric