Avec Alexandre nous restions enfermés chez lui ou chez moi. On s'embrassait durant des heures. On finissait souvent pas s'ennuyer. Dans mes souvenirs je ne trouve rien. Nous ne bougions pas trop. De temps en temps nous allions au multiplex de Saint-Quentin-en-Yvelines, avec son détour quasi inévitable par le Mc Doanald juste de l'autre côté de l'allée piétonnière. Nous y allions le plus souvent avec nos amis qui étaient les mêmes. Les parents de l'un nous emmenaient en voiture. Ceux d'un autres venaient nous rechercher après la séance. On y allait à quatre par voiture. Deux jours à l'avance il fallait préparer l'expédition. A l'entrée nous achetions du pop-corn, comme de vrais petits Occidentaux américanisés. Dans les films jouaient Tom Cruise, Julia Roberts, des dinosaures, des plantes vertes et des ballons de baudruches. Les héros pleuraient et reprenaient toujours le dessus. A la fin ils triomphaient de la vie. Si ça n'était pas des vilains Russes ou du monde tout entier. D'autres trouvaient l'amour malgré un physique à peu près aussi ingrat que Demi Moore ou Meg Ryan. Rain Man et Le cercle des poètes disparus comptent parmis les premiers films à m'avoir fait aimé le cinéma, et je n'imaginais alors même pas qu'il puisse exister mieux. Je m'étais faite offrir la cassette vidéo dès leur sorti, et à chaque coup de blues je regardais de nouveau l'un ou l'autre en m'empifrant de chocolat. Lorsque je me plaignais je trouvais toujours mes raisons mauvaises et dans ma tête je m'en excusais de toute mes forces auprès des victimes que tous les soirs on voyait mourir à l'heure du dîner dans notre téléviseur. J'aimais ma vie, mais en comparaison. Je ne trouvais pas de motifs valables à la colère puisque j'étais en vie. Alors je lisais beaucoup, des livres policiers, et des romans pas trop long. Et ça me faisait voyager. Le temps d'un bouquin je pouvais être une autre.
Lorsque j'ai commencé à fréquenter Erwann tout a changé. Mes copines lorsqu'elles trouvaient un nouveau mec le décrivaient souvent comme "formidable", mais lorsque cela était le cas elle n'hésitaient pas à préciser "Et en plus il a le permis!". Avant de connaître Erwann je ne comprenais pas vriament ce que cela pouvait avoir d'important. Après j'ai compris. Dans notre toute petite ville j'étais comme enfermée. L'horizon s'est découvert lorsque du jour au lendemain les déplacements et les kilomètres à parcourir ne furent plus un problème. Fini Rain Man et Le cercle des poètes disparus les samedi après midi parce que j'avais terminé tout mes devoirs et que je ne trouvais rien d'autre à faire. Lointain les vendredi et samedi soir enfermés dans ma chambre avec Alexandre et parfois quelques amis, avec pour occupation principale de changer les CD dans le lecteur. Erwann me faisait faire d'autres choses, il me sortait, et j'avais l'impression de virevolter d'un endroit à l'autre assise à la place passager de sa voiture. Il m'emmenait au bowling, il m'aprenait à jouer au billard. De temps en temps il m'emmenait en boîte de nuit. Mon frère et Erwann étaient devenus de très bons amis, si bien que mon père lui faisait confiance et que je n'avais plus d'heure pour rentrer. Même si Luc n'était pas là il fermait les yeux et on mentait à mon père qui je l'appris plus tard n'était pas dupe. "Tu mets tes doigts comme ça dans la boule Stef... Oui comme ça...". "Non, la queue de billard tu la mets comme cela sur tes doigts... Eh ouais pas mal! Pas mal du tout ma chère!".
J'étais en Première lorsque je suis sortie avec Erwann. Et lui était en première année d'études supérieures. Il m'emmenait aussi dans des soirées étudiantes où on me voyait heureuse comme pas possible d'être là. J'étais toujours souriante, et je m'appliquais à ne pas trop boire. Mon frère n'était jamais trop loin, il suivait les mêmes cours qu'Erwann. Mais si en aîné il m'encourageait à la modération, il m'aurait sans doute reniée si je n'avais bu que du coca pur. "Carpe Diem Stef!" aimait-il à me répéter. Et de temps en temps nous allions à Paris. Les personnes que je fréquentais alors que j'étais avec Alexandre, je ne les voyais pour ainsi dire plus. Même au lycée. Il n'ya vais qu'Anaïs et Claire qui étaient mes mailleurs amies et prenaient le même plaisir que moi à changer d'air. Anaïs sortait avec Samir, et Claire avec Pierrot, deux mecs presque aussi bien que mon Erwann et qui gravitait aussi dans le cercle d'ami de mon frère.
De nouveau il me semblait que c'était pour la vie.
Recevoir un mail à la publication de la prochaine page de mon journal? Cliquez ici!
Commentaires :
Re: Ciné pop-corn
J'ai à peu pres l'age que tu avais à l'époque...
Et je confirme que s'il y a bien UNE chose géniale quand on habite à Paris, c'est tout l'autonomie qu'on y gagne : à condition qu'ils nous fassent un minimum confiance, aucuns parents ne se fatiguent plus à trimbaler leurs enfants-ados en voitures pour les sortir ou les amener chez les copines : il y a toujours un métro quelque part.
Par contre, les films cons, ça m'arrive, même si j'essaye d'éviter les dégats :)
On commence a être quelques jouebeurs sur la zone du Gaumont Saint-Quentin! Bon, je suppose qu'on a tous eu les pop-corn coincés dans le ventre à cause des pleurs de Julia Roberts ou des vilains dinos... Si on avait survécu au Big Mac - frites - coca cola ingurgité au préalable bien entendu!
Alors je propose qu'on se fasse une rencontre de jouebeurs de Saint-Quentin pour partager notre expérience. Programme de la soirée : menu Big Mac avec bataille d'emballages de paille, crawl ensuite dans la piscine de boule en plastique sous le regard de Ronald Mc Donald, enfin sortis par le vigile, traversée de l'allée pour aller payer 10 euros afin de voir la dernière nullité venue d'Hollywood. "Troie" avec Brad Pitt ça vous va? Bon, comme on est des grands maintenant, j'ose vous proposer une suite à la soirée : pour cela il faudra vérifier que le Marina fait toujours bien karaoké le samedi soir. Et si le fausse Mylène Farmer y vient toujours avec Johnny Hallyday 78 (celui à la 505). Troisième partie de soirée : bowling de Coignière. Fin de soirée en fanfare à la Mélodie juste en face sur le parking...
Bon si ça vous dit rien tant pis alors...
Wandess
Ciné pop-corn
Je vois qu'on a eu le droit aux mêmes plans cinéma à préparer, réquisition de voiture et de chauffeurs, la même allée entre le Mc Do et le Gaumont (UGC à l'époque non?). Peut-être pas les mêmes films par contre. Mais sans doute aussi les pop-corn qui restent sur le ventre. Je ne me souviens plus des nullités que je suis allé y voir. Souvenir d'une connerie avec Jean-Claude Van Dam... Je me demande encore comment j'ai pu aller voir ça! Comme le Christophe Colomb avec Depardieu. Pas dur de me souvenir de l'année, c'était en 1992.
Ouais j'aurai dû faire comme toi, me trouver un grand frère avec le permis. Ou une fille plus âgé véhiculée. La clé des champs en quelque sorte... Bon, et le bowling c'était Coignière aussi?
Content de te lire, cette fois je te le dis.
A une prochaine.
W.